06
05 2021

  .  Par Arnaud Quilton

Rappel du rôle fondamental des conditions générales de vente pour les sites e-commerce

La vente en ligne a connu un essor considérable ces vingt dernières années et la crise sanitaire liée à la COVID-19 n’a fait que corroborer ce constat. En effet, les multiples périodes de confinement qu’ont connu les français ont bouleversé leurs usages en matière d’achat et un certain nombre de commerçants, autrefois sans site e-commerce, se sont vus contraints de créer leurs propres sites afin de préserver leur business. C’est d’ailleurs dans ce contexte que la France a connu un nombre record de création de sites marchands en 2020[1].

Pour autant, créer son site internet n’est pas sans contrainte. Outre les traditionnels aspects financiers inhérents au développement informatique d’un tel outil, il convient de rappeler que le droit réglemente de façon assez stricte la vente en ligne. A ce titre, outre les fameuses mentions légales, un document est particulièrement incontournable pour tout site e-commerce : il s’agit des conditions générales de vente.

Qu’est-ce que les conditions générales de vente e-commerce (CGV) ?

Les conditions générales de vente ne sont autres qu’un document visant à encadrer juridiquement les relations commerciales entre un vendeur et un acheteur sur internet. Spécifiquement, elles ont pour ambition de réunir toutes les informations qu’un vendeur doit fournir aux clients désireux d’acquérir ses produits en ligne : caractéristiques essentielles desdits produits, modalités et délais de paiement ou encore date et modes de livraison des produits commandés. Elles ont aussi pour objectif d’encadrer le processus de vente avec une description du « chemin » que doit emprunter le client pour commander sur le site.

Conformément au droit des obligations, dès que l’offre formalisée au sein des CGV est suivie d’une acceptation par le client, l’ensemble constitue un véritable contrat liant les parties.

Les conditions générales de vente sont à distinguer des conditions générales d’utilisation (CGU). Ces dernières ont pour objet de régir les modalités de fonctionnement d’un site internet et tendent à s’adresser non plus à ses clients mais à ses « utilisateurs ». Contrairement aux CGV, les CGU ne sont pas obligatoires (mais néanmoins fortement recommandées !) car elles permettent d’éviter tout usage abusif et détourné du site et tendent à limiter la responsabilité de l’éditeur du site dans certains cas spécifiques.

Les Conditions Générales de vente sont-elles obligatoires pour un site e-commerce et quelles informations doivent-elles comporter ?

La réglementation opère une distinction en fonction de la typologie d’acheteur présent sur le site e-commerce.

  • Pour les clients particuliers (B to C)

C’est principalement le Code de la consommation qui vient réglementer les relations B to C en assimilant le e-commerce à la vente à distance. En l’espèce, la loi impose la présence de CGV pour tous les sites e-commerce dès lors qu’ils s’adressent à des particuliers.

Conformément au Code de la consommation, le vendeur professionnel en ligne est tenu, avant toute opération de vente, au respect d’une obligation d’information « lisible et compréhensible »[2] à l’égard du client consommateur qui est parachevée par la communication des CGV avant l’achat.

Les CGV en B to C doivent notamment intégrer les informations suivantes[3] :

  • Les caractéristiques essentielles du bien ou du service commercialisé ;
  • Le prix du bien ou du service ;
  • En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le vendeur professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
  • Les informations relatives à l’identité du vendeur professionnel ;
  • Les informations relatives à la garantie légale de conformité ;
  • Les modalités d’exercice du droit de rétractation et les frais de retour du bien acquis sur le site e-commerce ;
  • Les modalités de résiliation du contrat ;
  • Les modes de règlement des litiges proposés par le site e-commerce.

 

  • Pour les clients professionnels (B to B)

En B to B, les règles inscrites dans le Code du commerce sont quelques peu plus subtiles puisque le vendeur professionnel n’a pas d’obligation légale de fournir à l’acheteur (lui aussi professionnel) ses CGV préalablement à l’acte d’achat en ligne. En revanche, la réglementation prévoit que si l’acheteur en fait la demande, le vendeur a l’obligation de fournir ses CGV. Les sanctions résultant d’un défaut de fourniture des CGV peuvent aller jusqu’à une amende de 75 000 euros pour les personnes morales[4].

Les CGV B to B doivent impérativement comprendre :

  • Les conditions de vente ;
  • Le barème des prix unitaires ;
  • Les réductions de prix ;
  • Les conditions de règlement.

Par ailleurs, que l’on soit en B to B ou en B to C, il importe de compléter ces informations obligatoires par d’autres clauses permettant de clarifier et d’affiner les droits et obligations des parties et notamment :

  • L’utilisation et le traitement des données à caractère personnel sur le site ;
  • Les conséquences de la force majeure ;
  • Les conséquences de la résiliation ;
  • Les droits de propriété intellectuelle sur le site et sur les biens et/ou services vendus ;
  • Les obligations du client ;
  • La limite de responsabilité du vendeur professionnel ;
  • La compétence juridictionnelle.

Comment s’assurer de l’acceptation des conditions générales de vente en ligne ?

L’acceptation en bonne et due forme d’un contrat conditionne sa validité juridique ; et comme tout contrat, les CGV doivent être signées afin que le consentement des parties soit caractérisé. Cette « signature » peut se formaliser de différentes manières :

  • Utilisation d’un dispositif de signature électronique ;
  • Utilisation d’un système de case à cocher (qui peut être assimilé à une forme de signature électronique) ;
  • Signature papier des CGV.

Par conséquent – et ceci est particulièrement valable en B to C -, le vendeur professionnel doit tout mettre en œuvre pour s’assurer que le client lit et accepte les CGV. Il se doit donc d’utiliser des dispositifs techniques pertinents et adaptés qui lui permettront d’être en mesure de prouver et de dater, si nécessaire, l’acceptation du contrat par les parties.

Comment communiquer les conditions générales de vente en ligne ?

Classiquement, les CGV peuvent être annexées à différents documents, comme un bon de commande, un devis ou encore un catalogue.

En ligne, les CGV doivent impérativement être communiquées par écrit sur un support durable et fiable concomitamment à l’achat.

Par « durable » et « fiable », il convient d’entendre un support qui ne pourra pas être altéré après consultation et/ou validation des CGV. A ce titre, un lien renvoyant vers une page où sont produites les CGV apparaît être à proscrire car la preuve de la consultation de ce lien par le client risque d’être complexe à rapporter ; de plus, la page peut être amenée à subir des interventions techniques ne garantissant pas le caractère inaltérable du document.

Enfin, les CGV doivent être rendues facilement accessibles au client avant, pendant et après la vente, et ce suffisamment longtemps que nécessaire.

Ainsi, les CGV constituent un document fondamental et incontournable permettant de régir les droits et obligations des parties dans le cadre d’une vente en ligne. Elles jouent ni plus ni moins que le rôle de contrat entre les parties et il importe donc d’apporter le plus grand soin dans leur rédaction en prenant notamment en compte les spécificités propres :

    • Au secteur d’activité (y compris géographique) du vendeur ;
    • Au type d’acheteur concerné : professionnel et/ou consommateur ;
    • Aux types de produits et/ou services vendus sur le site e-commerce (qui peuvent être assujettis à des réglementations particulières : produits e-santé ; prestations informatiques ; denrées alimentaires…
    • Au support de vente utilisé : site e-commerce « simple » ; marketplace ; click & collect etc.

Chacune de ces spécificités va venir paramétrer et adapter le contenu des CGV et leur permettre ainsi d’être réellement adaptées aux produits et services proposés par le professionnel.

Autant d’éléments qui incitent à éviter, autant que possible, l’utilisation de trames génériques et/ou inadaptées qui peuvent être sources d’incertitudes – et donc de risques ! – juridiques, aussi bien pour le vendeur que pour l’acheteur.

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[1] « Covid-19, confinement… le e-commerce a explosé en France en 2020 », CAPITAL.FR, 4 février 2021, disponible à l’adresse : https://www.capital.fr/entreprises-marches/covid-19-confinement-le-e-commerce-a-explose-en-france-en-2020-1393110

[2] Articles L. 121-17 et L. 121-19-3 du Code de la consommation.

[3] Articles L. 121-17 et L. 111-1 du Code de la consommation.

[4] Article L. 441-1 du Code du commerce.